La semaine dernière, j’ai présenté, en commission des Affaires européennes, une proposition de résolution européenne visant à dénoncer l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, ainsi qu’à mettre en œuvre les sanctions nécessaires à l’encontre d’Israël et ses dirigeants pour mettre fin à la guerre génocidaire du gouvernement d’extrême droite de Benyamin Netanyahou.
Durant plusieurs semaines, j’ai préparé l’examen de ce texte en conduisant une série d’auditions à l’Assemblée nationale. Grâce au formidable travail des administrateurs de l’Assemblée nationale, nous avons pu rencontrer des experts de la situation, tant par leur engagement international, en particulier au Proche Orient, que par leur maîtrise du droit international.
L’examen de cette proposition le mercredi 2 juillet a été l’occasion d’une alliance terrible entre les macronistes et l’extrême droite, pour voter à plusieurs reprises contre le droit international.
Je vous raconte.
“Le droit international humanitaire menacé”
Nous avons commencé nos travaux par une audition de Jean‑François Corty, président de Médecins du Monde, et Raphaël Pitti, anesthésiste-réanimateur et humanitaire. Ce dernier est président de l’ONG HUSOME (Humanité, Solidarité, Médecine), qui gère des centres de santé et la distribution d’eau potable à Gaza. Il s’est rendu à deux reprises à Gaza, notamment en janvier-février 2024, pour soutenir les équipes à l’hôpital européen de Gaza et à l’hôpital Al Aqsa. Leurs témoignages ont été particulièrement poignants et émouvants.
Jean-François Corty a commencé par nous rappeler le terrible bilan humain de la guerre menée par Israël : 54 000 morts officiels. On peut le démultiplier, a-t-il souligné, ce chiffre n’incluant que les personnes formellement identifiées, et ne comprenant pas les décès indirects, comme celles qui meurent par défaut de soin, par exemple. Pour lui, les chiffres de 150 000 à 200 000 morts directs et indirects parus dans la revue The Lancet sont “plausibles”.
Il a ajouté d’autres éléments cruciaux quant à la situation actuelle : 90% des infrastructures essentielles du bâti ont été détruites à Gaza, et l’entièreté de la population a été déplacée, parfois à plusieurs reprises.
Il précise que “les camions d’aide humanitaire qui entraient dans gaza avant le 7 octobre 2023 – l’attaque du 7 octobre 2023 relevant de crimes de guerre et contre l’humanité qu’il faut aussi dénoncer – étaient déjà insuffisants. La politique coloniale en Cisjordanie, faite de crimes de guerre, des meurtres de civils et une entrave à l’action humanitaire existent de longue date, comme le blocus sur Gaza, qui remonte à au moins 17 ans, les 700 000 colons en Cisjordanie et à Jérusalem étant arrivés avant le 7 octobre 2023”.
Les travaux de Médecins du monde sont indispensables pour prendre la mesure de l’horreur de la situation. Leur dernier rapport s’attarde sur l’enjeu de la malnutrition. Leur enquête, faite sur 15 000 enfants, met en lumière une explosion de la malnutrition, et une corrélation entre l’intensité du siège et le taux de malnutrition. Sa conclusion est sans appel : la faim, la soif, la destruction et le siège sont des armes de guerre utilisées par l’armée israélienne.
Jean-François Corty nous a fait état de fortes entraves au droit international humanitaire organisées par le gouvernement israélien. 400 humanitaires ont été tués, et 33% des associations déclarent des blessés ou des morts parmi leur personnel. Il a rappelé que les humanitaires ont accès à très peu de zones à Gaza, et que l’accès à certaines zones est de plus en plus entravé en Cisjordanie, dans un contexte d’accélération de la politique coloniale. Pour lui, les humanitaires ne sont pas ciblés volontairement, comme le sont les journalistes, mais subissent les effets collatéraux de quartiers laminés sans proportionnalité, sans discernement. Une exception : lorsque ce sont les bureaux des ONG qui sont détruits, ce qui est arrivé à deux reprises pour Médecins du Monde. Le gouvernement israélien se montre en parallèle de plus en plus répressif vis-à-vis des organisations non gouvernementales (ONG) : les acteurs israéliens ne peuvent plus travailler avec l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et émettre la moindre critique sur la politique israélienne.
“On n’arrête pas un génocide avec des gesticulations compassionnelles”
Il a argumenté pour démontrer que la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), structure choisie par le gouvernement Netanyahou pour gérer l’aide, ne répond pas aux principes humanitaires comme l’impartialité ou l’indépendance. Selon lui, c’est un “opérateur d’Etat qui fait des distributions de manière chaotique”. “Il y a énormément de morts lors des distributions, on n’a jamais vu un dispositif comme celui-là. Autant de mécanismes de dénaturation de la raison humanitaire, de déshumanisation des gens. On n’a jamais vu ça”, précise-t-il. Il pointe la contemporanéité entre sa mise en place et des annonces politiques dont elle contribue à la mise en œuvre : la “déportation de tous les habitants de la bande de Gaza pour faire la riviera de M. Trump”. Il s’agit pour lui d’une “instrumentalisation de la raison humanitaire pour une politique coloniale qui utilise tous les moyens, y compris la dynamique génocidaire”.
“Dans un contexte de génocide plausible, comme l’a rappelé à plusieurs reprises la Cour internationale de justice, on est censé tout faire pour arrêter le génocide quand on est un Etat signataire des accords de prévention et de répression des crimes de masse et des crimes de génocide. Pourtant ce n’est pas ce qu’on observe, notamment de la part de la France qui est signataire”, a insisté Jean-François Corty. “Macron n’a rien fait pour mettre une pression qui puisse influencer le gouvernement d’extrême droite de M. Netanyahou, on n’arrête pas un génocide avec des gesticulations compassionnelles”. Pour lui, l’urgence est d’arrêter d’envoyer des armes, de respecter le cessez-le-feu et de mettre en œuvre des pressions économiques tangibles, notamment à l’échelle européenne, ainsi que de soutenir la Cour pénale internationale, par exemple en refusant le survol du territoire français par le Premier ministre israélien.
Raphaël Pitti nous a indiqué partager cette analyse, rappelant l’inaction du gouvernement Macron : “Depuis 20 mois, nous ne faisons rien, nous n’avons jamais convoqué l’ambassadeur d’Israël pour [les crimes commis à Gaza]. Le monde occidental perd toute sa crédibilité dans le monde aujourd’hui, il y a une nécessité d’action.”
Il témoigne avoir vécu à Gaza sa “pire expérience comme médecin dans une zone de guerre depuis plus de 30 ans”. Il raconte avoir vu 25 000 réfugiés autour de son hôpital, pour 600 places à l’intérieur. Dans son récit, il parle de “triage inversé”, “pour la première fois de [sa] vie” : “on laisse mourir les blessés les plus graves, on ne prend que ceux qu’on est sûrs de soigner avec peu de moyens”. Pour lui, “c’est la catastrophe humanitaire la plus importante depuis la Seconde Guerre mondiale, nous sommes à un moment clé de notre civilisation”.
Pour Raphaël Pitti, un ultimatum humanitaire devrait être mis en œuvre. Il pourrait par exemple s’accompagner de sanctions de l’Union européenne si Israël ne respecte pas le cessez-le-feu sous le temps qui lui est donné pour s’organiser.
Il a enfin rappelé les menaces que subissent celles et ceux qui prennent la parole pour défendre le droit international : “Nous témoignons à partir du droit international humanitaire, nous restons dans la neutralité, l’indépendance, la non-discrimination. Si nous témoignons c’est parce qu’il y a un non-respect de ce droit international humanitaire. On nous accuse d’être pro-Hamas, on nous menace de mort, parce que nous prenons la parole par rapport à ce droit international humanitaire.” Jean-François Corty est aussi revenu sur ce point, évoquant la responsabilité de l’extrême droite et de certains médias qui discréditent les ONG et légitiment les attaques à leur encontre.
“La France pourrait être complice de violations de traités internationaux”
Après cet échange marquant, nous avons reçu Julia Grignon, professeure de droit humanitaire, directrice scientifique de l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire et présidente de la sous-commission « Droit international humanitaire et action humanitaire » de la Commission nationale consultative des droits de l’homme.
Son expertise en matière de droit international nous est précieuse. Elle a commencé par nous rappeler le contexte juridique pertinent pour analyser la situation : un contexte plus vaste d’occupation depuis 1967, incluant la Cisjordanie, Gaza et Jérusalem est, c’est-à-dire l’intégralité du territoire palestinien, qui constitue, selon l’article 42 du règlement de La Haye, un territoire occupé. Cette situation a été relevée par la Cour internationale de justice (CIJ) en 2004 et 2024. L’an dernier, la CIJ a ainsi précisé que la présence physique n’était pas nécessaire pour caractériser une occupation, le facteur déterminant étant que l’autorité de l’occupant soit toujours en mesure de s’exercer. C’est le cas à Gaza : Israël lève des taxes, contrôle la circulation, contrôle militairement le territoire, entre autres. Le fait que la Palestine soit un territoire occupé est ainsi déterminant sur le droit applicable : “quand on est une puissance occupante il n’est plus question de légitime défense en droit international”. Elle a insisté sur la question de la proportionnalité et de la force : “même si on considère que l’agression par un groupe armé déclenche la légitime défense, l’usage de la force doit être proportionné. Il n’y a aucun doute aujourd’hui sur le fait qu’il est disproportionné”.
Pour elle, “l’évidence est là” : populations civiles déplacées, conditions de sécurité et d’hygiène pas assurée, propriétés privées détruites, hôpitaux attaqués, personnels humanitaires qui font l’objet d’attaques sans précédents, civils qui n’ont pas un approvisionnement suffisant, conditions de distribution de l’aide humanitaire qui ne correspond pas aux standards, etc.
Elle rappelle l’obligation de la France face au droit humanitaire. D’après les Conventions de Genève, elle doit à la fois s’y conformer, mais aussi faire ce qui est raisonnablement en son pouvoir pour le faire respecter par les parties concernées.
“On ne peut pas dire que la situation à Gaza est insupportable et attendre que ce soient les dockers à Marseille qui refusent de charger les bateaux”
Aussi, la France pourrait être complice de violations de traités internationaux. Julia Grignon prend l’exemple des mesures conservatoires de janvier 2024, dans lesquelles la Cour internationale de justice demande à Israël de cesser toute action allant vers la commission de génocide. De ce fait, la France doit tout mettre en œuvre pour prévenir un éventuel génocide. En ne le faisant pas, il s’agirait d’une violation de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948.
L’enjeu est similaire avec le traité sur le commerce des armes. Son article 6 interdit les transferts d’armes qui violeraient les obligations des États parties au regard du droit international, ou si ces États ont connaissance de ce que les armes visées pourraient servir à commettre un génocide, des crimes contre l’humanité et crimes de guerre.
Julia Grignon a également évoqué le volet économique, et la question des obligations relatives aux produits des colonies israéliennes en Cisjordanie. Les États ne doivent prendre aucune mesure qui peut alimenter la commission d’une infraction, donc ne devraient pas acheter de produits venant des colonies. Une vigilance importante est de mise, au regard du poids de l’UE dans les exportations israéliennes : 33 % d’entre elles sont à destination de l’Europe. Or, l’enjeu de l’étiquetage pose problème, l’Union européenne n’ayant aucun moyen de vérifier que les produits israéliens viennent ou non des colonies. En permettant qu’ils soient commercialisés dans l’UE, on contribue à une violation du droit international humanitaire en Cisjordanie.
Elle a terminé son propos en insistant sur l’urgence d’agir : “si je regarde les sanctions adoptées dans d’autres contextes, je ne peux pas m’expliquer que certaines l’aient été contre la Russie et aucune contre Israël”. “On ne peut pas dire que la situation à Gaza est insupportable et attendre que ce soient les dockers à Marseille qui refusent de charger les bateaux”, a-t-elle illustré. Pour elle, l’heure est à la défense du droit international : “les États du côté du système multilatéral doivent être plus vocaux que ceux qui ne le sont pas car ils sont beaucoup plus nombreux. C’est cette voix là qu’il faut porter”.
“Ce conflit interroge aussi l’ordre juridique mondial”
Nous avons ensuite auditionné Johann Soufi, juriste international spécialisé en droit pénal international et ancien chef du Bureau juridique de l’UNRWA à Gaza. En préambule, il a indiqué que les préconisations de ma proposition de résolution « correspondent aux demandes portées depuis vingt mois, voire davantage, par les juristes spécialisés ».
Il a rappelé que « tous les accords de coopération de l’Union européenne comportent une clause essentielle, conditionnant leur validité au respect des droits humains et de l’état de droit », et que « certains accords avaient déjà été suspendus sur cette base », citant par exemple le cas du Sri Lanka. Selon lui, « la prise de sanctions par l’Union européenne contre Israël sur ce fondement est juridiquement possible et nécessaire ». Il a précisé qu’elle ne nécessite pas l’ouverture de poursuites pénales formelles puisqu’elle relève d’un choix de politique étrangère. « Des mesures telles que le gel d’avoirs ou les embargos économiques, lorsqu’ils sont soumis à un contrôle juridictionnel effectif comme c’est le cas pour l’Union européenne, constituent un outil efficace de mise en œuvre du droit international, sans que cela n’entraîne de violations des droits fondamentaux ».
Si les demandes de ma proposition étaient suivies, « ce ne serait pas la première fois que l’UE prendrait des sanctions en réponse à des violations flagrantes du droit international », a-t-il souligné, en rappelant qu’on en est, par exemple, au 17e train de sanctions contre la Russie. Il a précisé que « les sanctions individuelles ou sectorielles prises à l’encontre de la Russie – dans les domaines de l’énergie, des finances ou des biens à double usage – pourraient parfaitement être adoptées dans le cas présent ».
Selon lui, l’absence de mesures prises à l’encontre d’Israël, « en dépit des nombreuses violations du droit international documentées », met en lumière un double standard de la politique européenne. « Après l’agression russe contre l’Ukraine, des sanctions ont été rapidement adoptées. D’autres gouvernements ont également été ciblés par des sanctions économiques sectorielles, comme la Syrie ou l’Iran. Mais aucun régime comparable n’a été appliqué à Israël, alors même que des violations massives du droit international sont établies par de multiples sources crédibles, notamment onusiennes ».
Rejoignant d’autres intervenants, il a rappelé un principe fondamental du droit : à causes égales, traitement égal. Or, ce traitement différencié, selon lui, « affecte directement la cohérence de la diplomatie européenne face aux violations du droit international ». Pour lui, ce double standard « fragilise non seulement les institutions européennes elles-mêmes, ainsi que les valeurs qu’elles sont censées incarner et défendre, mais plus généralement l’ordre juridique international ». « Il met aussi en péril les fondations du système international construit au lendemain de la Seconde Guerre mondiale », en particulier lorsqu’il s’agit de violations aussi graves. Il a cité à ce titre la Convention de 1948 sur le génocide, qui oblige les États à tout faire pour prévenir un génocide, ainsi que l’arrêt rendu par la Cour internationale de Justice dans l’affaire Bosnie c. Serbie (26 février 2007, §431), qui précise que « la responsabilité des États est d’autant plus lourde qu’ils ont de l’influence sur l’État soupçonné de génocide : « On ne va pas demander la même chose aux Fidji qu’aux États-Unis », a-t-il illustré.
L’Union européenne, n’étant pas un État, elle ne peut pas être poursuivie devant la CIJ, mais Johann Soufi a précisé que l’association créée avec d’autres juristes internationaux, JURDI (Juristes pour le respect du droit international), avait officiellement mis en demeure la Commission et le Conseil de l’UE pour leur inaction face au risque de génocide à Gaza. Il a précisé qu’il ne s’agissait pas d’accuser l’UE de complicité, mais de s’interroger sur le respect de ses propres principes et obligations, notamment à la lumière des ordonnances de la CIJ et des mandats de la CPI.
Interrogé sur la potentielle complicité de la France, il a indiqué qu’il était peu probable que la France soit condamnée en tant qu’État pour sa complicité avec les crimes commis par Israël, mais que « des individus et des entreprises françaises » le seraient certainement. Il a cité l’exemple de l’entreprise Lafarge poursuivie devant la justice française pour complicité de crimes contre l’humanité. À ses yeux, aucune entreprise ni aucun responsable politique ne peut prétendre ignorer la nature criminelle de ce qui se passe aujourd’hui à Gaza et en Cisjordanie, tant les mécanismes d’alerte sont nombreux : rapports des commissions d’enquête et des experts indépendants des Nations Unies, trois ordonnances successives et de plus en plus contraignantes de la CIJ, mandats d’arrêt de la CPI pour des crimes extrêmement graves, rapports d’ONG comme Human Rights Watch ou Amnesty International, qui dénoncent la nature criminelle des pratiques israéliennes dans le territoire palestinien occupé.
Il a également rappelé que « la France est l’un des États les plus avancés dans l’utilisation de la compétence universelle », jugeant par exemple les auteurs étrangers de crimes commis au Rwanda ou au Liberia dans les années 90. La légitimité de la France de juger ces individus au titre de la compétence universelle repose aussi, selon lui, sur la détermination de la France de poursuivre ses propres ressortissants lorsqu’ils commettent des crimes similaires, sans quoi il y aurait un risque que ces poursuites soient perçues comme une forme d’hypocrisie, voire de néocolonialisme. Il a ajouté que des poursuites devraient ainsi être engagées contre des responsables franco-israéliens soupçonnés de participer aux crimes commis par Israël à Gaza et en Cisjordanie et contre les individus et entreprises complices de ces crimes.
Pour Johann Soufi, « ce qui se passe aujourd’hui en Palestine met à l’épreuve l’ensemble de l’ordre juridique mondial ». Citant sa tribune publiée dans Le Monde en septembre 2023 : « Le futur de la Cour pénale internationale se joue aussi en Palestine », il estime que la justice internationale est aujourd’hui confrontée à son plus grand test : la poursuite de responsables des alliés des pays occidentaux pour des crimes internationaux. Il a rappelé que « la CPI avait considérablement renforcé sa crédibilité ces dernières années, avec notamment le mandat contre Vladimir Poutine, puis ceux contre Benyamin Netanyahou et Yoav Gallant ». Mais il a également souligné que « cette montée en gamme s’est accompagnée d’attaques et de sanctions contre la Cour et ses membres, y compris le procureur et plusieurs juges, dont la vie personnelle et le travail sont désormais directement menacés par des pays occidentaux ». Il n’est pas surpris de l’abandon de la CPI « par plusieurs de ces pays occidentaux, notamment dirigés par l’extrême droite » mais regrette l’ambiguïté et la timidité du soutien de la France vis-à-vis de la Cour. Face à cette situation, il appelle à un soutien fort à la CPI, non seulement symbolique (par des déclarations publiques claires), mais aussi financier, de la part des États parties.
L’audition a enfin permis d’évoquer une note interne à la Commission européenne, récemment divulguée, dans laquelle des violations des droits de l’homme par Israël sont explicitement reconnues. « C’est la première fois que l’Union européenne le reconnaît officiellement. Il faudra voir quelles conséquences seront tirées de ce constat », a réagi Johann Soufi.
Il a insisté sur un point clé : « Il ne faut pas confondre le droit international et sa mise en œuvre. » Selon lui, « la justice internationale fonctionne : les mécanismes d’enquête des Nations Unies sont mobilisés, la CIJ a rendu plusieurs ordonnances, la CPI a lancé des mandats d’arrêt ».
« Ce qui manque, c’est la volonté politique d’appliquer les recommandations et les décisions de ces institutions internationales ». Il conclut en estimant que « l’humanité ne met en œuvre des mécanismes de protection qu’après avoir connu l’abîme », et que « cette crise, appelée à durer plusieurs années, aboutira inévitablement à une réforme du système international ».
Un vote contre le droit international
À l’issue de ces riches auditions, j’étais renforcée dans la conviction que la France avait toutes les cartes en main pour agir face à la situation en Israël-Palestine, tant immédiatement qu’à long terme. La prochaine étape consistait à en convaincre les députés membres de la commission des Affaires européennes.
Pourtant, nous n’avons pas réussi à faire adopter cette résolution. La salle de cette commission était remplie comme jamais : les députés des groupes macronistes, de droite et du Rassemblement national se sont massivement mobilisés pour refuser de dénoncer l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël en commission des affaires européennes. Lors de la discussion, ils n’ont opposé aucun argument sérieux, se contentant d’insultes à l’égard de la France insoumise. Les 25 députés présents en commission pour représenter ces groupes ont fait le choix de voter un amendement de suppression de l’article unique, proposé par Caroline Yadan, le rejetant de ce fait.
Ils ont ensuite rejeté un texte légèrement moins ambitieux proposé par une députée écologiste.
Dans le cadre de l’examen de ce texte, ils ont refusé de voter un amendement proposant d’y mentionner le soutien de la France à la Cour Pénale internationale. C’est scandaleux. Cela aurait pu être encore pire : Caroline Yadan avait déposé un amendement pour nier l’existence d’un blocus humanitaire à Gaza, mais l’a retiré avant la discussion. Auraient-ils été capables de le voter ?
Ces votes contre le droit international ne doivent pas nous faire baisser les bras. Le combat doit continuer : j’ai tenu à être présente ce samedi à Paris pour la manifestation contre le génocide à Gaza. Vous pouvez compter sur les insoumis. Nous continuons d’appeler la France à dénoncer l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, à décréter un embargo sur les armes, à appliquer les mandats d’arrêt émis par la Cour pénale internationale en arrêtant Benyamin Netanyahou quand il survole notre espace aérien et à imposer des sanctions économiques et financières à l’encontre d’Israël.
Agissons pour les Palestiniens, et n’oublions jamais Gaza.